Mbolo Mélomane ! Dans cette série de Mood News spécial rap, il nous fallait revenir sur Yvy Real, qui a marqué 2025 d’une pierre deux fois taillée : un premier album, « 5h à Paris », puis un deuxième, « Genesis », en l’espace de quelques mois. Deux projets, une seule signature : celle d’un artiste qui refuse de dormir.
5h à Paris : le journal d’un rappeur en transit
Au premier abord, l’album est très introspectif. Les refrains mélodieux s’alignent parfaitement aux couplets plus chauds du rappeur et des invités. Malgré quelques points chauds, le titre éponyme du projet donne, en réalité, le timpo. En effet, on entre dans l’album sur un sample de message affectif suivi d’un couplet unique du rappeur.
Un carnet rap ouvert à 5h entre Paris et Libreville :
Yvy Real embarque ses mélomanes dans un voyage en escales de 21 titres. En effet, on a l’impression qu’au-délà des collaborations, le projet se positionne comme un discours adressé à ses fans, une mise à nu de ce qu’il est devenu : « Yvy, c’est le Real ». En plus, parmi les invités, le ténor de POG, Fely Tchiss nous lâche deux belles entrées à travers les titres « Nzambé » et « Les couloirs ». Ex-membre du BGMFK, Yvy n’hésite pas nous rendre nostalgique en écoutant « La limite ce n’est pas le ciel » (feat Micky R) ou « Freedrill » (feat Troy).
Shot-out à Devostic, Roy O et Nelfla qui participent à la grande diversité de style que connait le rap. D’ailleurs, Yvy Real n’hésite pas dédicacer le crack M.O.R dans son « Fun Freestyle » ; de quoi rappeler la force du soutien aux pairs dans un même mouvement culturel.
Featurings et influences, gabonaises, gospel et rap US dans « 5h à Paris:
Ce projet rap en apparence témoigne beaucoup d’influence gospel et rap US. C’est notamment le cas avec le titre « Lumière » où la technique et le couplet de Roy O rappelle certains morceaux de Nas dans King Deseases 3. Entre feats inspirés et introspection solo, Yvy réussit à conjuguer partage et authenticité. 5h à Paris est un projet presque complet bien fidèle à la personnalité de son auteur. Yvy Real y mêle son égotrip, sa vision du monde et ses résolutions. Cet album est espace où le rap habite les pensées nocturnes d’un artiste qui trace son chemin grâce à « L’Art du samouraï ».
Le projet est un carnet intime : heures creuses, solitude, introspection… mais aussi éclats de flow qui rappellent que Paris est plus qu’une ville, c’est une métaphore du combat pour exister. Les instrus varient entre sonorités planantes et kicks secs, témoignant d’une plume qui varie entre spleen et punchlines affutées. C’est un album qui pose une empreinte artistique forte dans le rap gabonais.
Exercice difficile dans un projet aussi dense, mais la Rédac’ a tenté le jeu du Top 5 :
- Freedrill (feat Troy)
- L’Art du Samouraï
- La limite ce n’est pas le ciel (feat Micky R)
- Back to sender
- Posse (feat Nelfla)
Genesis : la seconde naissance de Yvy Real
Genesis est un projet plus léger : 11 titres dont 3 en featurings. Si 5h à Paris est un carnet de voyage, Genesis est une fresque. Genesis, c’est un peu la mise en musique de la question : quelle est l’origine de ton action ?
Entre quête de sens et choix esthétiques
De Delta Postal, entre sample en guise de refrain et beats drill, le rappeur essaie à travers chaque titre, d’exprimer l’origine de ses idées, résolutions ou mode de vie. Dans Genesis, on vit la prière à la fin du projet avec le titre « Baba ». C’est une magnifique prière dont le refrain n’est autre que celui du titre « Eh Baba » d’Enock Bahwere en sample. Il faut dire que cette technique marche très bien. Car, on retrouve le même effet avec le sample de « Video games » Lana Del Rey pour le titre « Spleen ». Ce titre est d’ailleurs sorti bien avant l’album, annonçant le tempo du projet :
Collaborations et cohérence artistique
En terme de collaborations, on en retrouve trois. Il s’agit notamment de RSK & Rakim , Sam Kid, Nelfla & Don Skin respectivement dans les titres « CSM », « Djany » et « Oxygène ». Par ailleurs, que ce soit « Spleen » ou « 24K », tout comme celui de l’album, chaque titre aborde à peu près, selon l’angle de vue, la même couleur. On y perçoit un retour aux origines, une relecture personnelle du passé. C’est comme si Yvy voulait écrire son propre manifeste en alignant quelques rimes sur chaque beat.
La production accompagne ce virage vers une atmosphère où les refrains se transforment en chant et où la technique sert un propos moins superficiel. Avec Genesis, tout comme avec 5h à Paris, au-delà de tout, Yvy Real ne cherche pas seulement à rapper. D’ailleurs, après écoute, l’on a plus l’impression que les deux projets ne sont que les parts d’une même œuvre. C’est du 2 en 1.
5h à Paris – Genesis : une année 2025 estampillée Yvy Real
Enfin, deux albums en une année, c’est rare, c’est audacieux. Entre Paris et Libreville, entre rue et esprit, il construit une double identité musicale qui parle autant aux puristes qu’aux explorateurs de nouveaux horizons. Toutefois, l’on déplore quand-même certains titres qui tirent en longueur pour rien. Certaines prods mériteraient d’être abrégées plutôt que de laisser le mélomane avec plusieurs secondes de silence d’un titre qui, en apparence, est déjà fini.